sexologue

Ça fait quoi, au juste, un.e sexologue?

Avec des séries comme Sans rendez-vous, le nombre grandissant des professionnel.le.s de la santé qui offrent des conseils via des plateformes comme TikTok, Instagram et cie ainsi que la fulgurante popularité d’OnlyFans où l’on peut voir nombre de sex educators offrir conseils et recommandations, on constate que les discussions sur la sexualité sont dans l’air. Les savoirs sexologiques se démocratisent et sont plus accessibles que jamais. Mais où se situent les sexologues là-dedans? De plus, avec la quantité effarante de demandes de soutien en santé mentale auprès de l’Ordre des psychologues (environ 24 000 par mois), les sexologues peuvent-ielles aider à désengorger le système de santé? Bref, comme beaucoup de gens nous demandent souvent « Coudonc, ça fait quoi, un.e sexologue? », j’ai décidé de répondre à la question. 

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Être sexologue, c’est quoi

À la base, le ou la sexologue est formé.e pour évaluer le comportement et le développement sexuels. Ce que ça veut dire, c’est que nous avons une formation complète qui permet de faire un portrait global du fonctionnement sexuel de la personne. Ainsi que d’adresser un jugement clinique pour l’aider à « améliorer, maintenir et rétablir la santé sexuelle. » 

Les sexologues sont habilités à faire des interventions permettant à la personne qui consulte d’obtenir du soutien face à une ou des problématiques rencontrées. En France, l’appellation sexologue n’a pas de réglementation. Elle est souvent plus associée au métier de médecin avec spécialisation. L’utilisation du titre au Québec est réservée aux personnes inscrites à l’Ordre des sexologues du Québec. 

Le titre vient évidemment avec des responsabilités. Il y un code de déontologie à respecter, mais également une posture qui exige crédibilité et une forme de neutralité. Prenons un exemple simple : je suis approchée par une marque de jouets sexuels qui souhaite que je m’associe à elle. L’entreprise me paye pour mettre de l’avant ses produits, afin qu’ils soient « validés », en quelque sorte, par une sexologue. Est-ce que je peux? Eh bien, non. Ça ne peut pas fonctionner, car je suis en conflit d’intérêts. Cela dit, je peux absolument parler plus globalement de jouets sexuels. Je suis libre d’évoquer leurs bénéfices possibles et faire de l’éducation à la sexualité autour du sujet. Face au public, on se doit d’être vigilant.e.s et s’assurer d’avoir une présentation professionnelle. Et on ne peut inciter les gens à avoir recours à tel ou tel service qui, par exemple, nous avantagerait financièrement.  

Intervenir comme sexologue 

Les interventions sexologiques peuvent se situer pendant, en amont ou en aval. On parle aussi souvent de prévention primaire, tertiaire et secondaire. Prenons l’exemple de l’éducation à la sexualité pour illustrer cela et, plus précisément, les violences sexuelles. 

On intervient en amont afin d’informer les étudiant.e.s et les élèves sur les conditions dans lesquelles il y a consentement ou non. Le but est de prévenir les violences à caractère sexuel. Pour l’aspect « pendant », on pense plus aux actions entreprises une fois la situation adressée. Par exemple, la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur a été adoptée en 2017. Cela a amené la création d’un guichet unique dans chaque établissement postsecondaire. Il sert à recevoir les plaintes et appuyer les étudiant.e.s dans leurs démarches. Dans ce cas, on va aussi offrir des formations aux pairs sur la façon d’accompagner adéquatement les victimes. Finalement, on amène du soutien aux survivant.e.s en les accompagnant dans leur démarche de guérison et, si ielles le désirent, de dénonciation. 

Des expertises diversifiées

Comme bien des métiers, chaque sexologue a son expertise propre et se spécialise sur certains thèmes et clientèles. Mais il y a aussi une différence entre les sexologues bachelièr.e.s, les sexologues avec maîtrise et les professionnel.le.s en sexologie. 

Le baccalauréat en sexologie est professionnalisant et permet d’adhérer à l’OPSQ (Ordre professionnel des sexologues du Québec). Les sexologues avec un baccalauréat travaillent dans des milieux très variés ; éducation (écoles, cégeps, commissions scolaires), santé publique (CIUSSS, CLSC, hôpitaux), organismes communautaires (maisons de jeunes, centres d’hébergement). Certain.e.s vont aller vers les médias (allô!), par exemple, et faire de l’intervention via différentes plateformes. Ça donne des personnes comme moi avec un pied dans les médias et un autre en clinique. Le bac en sexologie permet de faire de la relation d’aide. 

Et des responsabilités variées 

La maîtrise en sexologie mène à deux grands axes : clinique ou recherche-intervention. Le premier axe mène les sexologues à travailler en clinique et donne accès au titre de psychothérapeute/sexothérapeute. Il permet également de demander une attestation d’évaluation des troubles sexuels. Le ou la sexologue qui possède ce papier sera amené.e à faire des évaluations sexolégales et en délinquance sexuelle (ex.: évaluer un risque de récidive chez un agresseur sexuel). La maîtrise clinique permet de faire de la psychothérapie. 

Dans le cas de la recherche-intervention, les sexologues œuvrent comme chercheur.e en sexologie. Ielles peuvent travailler, par exemple, à l’élaboration de programmes pour la santé publique. Ielles peuvent également participer à des recherches pour l’avancement de la sexologie et des connaissances liées à la santé sexuelle humaine. Le doctorat permet évidemment d’amener le ou la sexologue a approfondir encore plus ses recherches.

D’autre part, il existe aussi de plus en plus de professionnel.le.s en sexualité/sexologie. Ces personnes n’ont pas de permis de pratique comme sexologue et ne peuvent donc utiliser le titre. Cependant, elles peuvent agir comme intervenant.e en santé sexuelle et faire profiter le public de leur expertise et leurs connaissances. C’est le cas, par exemple, de Maude Painchaud Major, créatrice de Sexplicite. Elle se spécialise dans l’éducation à la sexualité et donne des formations un peu partout dans les écoles. 

Ici, il faut tout de même faire attention. Si certaines personnes, comme Maude, le font avec bienveillance et rigueur, ce n’est malheureusement pas le cas de tous.tes. Idéalement, on s’informe sur la personne qui offre ce type de contenu et d’intervention afin de s’assurer que les informations partagées soient valides et fiables. 

La différence entre relation d’aide et psychothérapie 

Une question qui revient souvent en clinique, c’est : quelle est la différence entre la relation d’aide et la psychothérapie. Pour le commun des mortel.le.s, la nuance ne semble pas si grande, mais elle est pourtant importante. Lorsqu’on fait de la relation d’aide, on apporte un soutien à une personne dans un cadre précis afin d’améliorer la santé sexuelle de cette dernière. Cela se fait via de l’écoute active, en offrant un espace pour discuter des problématiques rencontrées, en proposant des conseils et des stratégies pour aider la personne à améliorer sa situation. Le problème discuté sera ancré dans le présent; on est dans le « ici et maintenant ».

Du côté de la psychothérapie, on s’intéresse plutôt à créer « des changements significatifs dans son fonctionnement cognitif, émotionnel ou comportemental, dans son système interpersonnel, dans sa personnalité ou dans son état de santé. » Le travail du ou de la sexologue se rapproche ici plus de celui du ou de la psychologue. Donc, on dépasse la relation d’aide de soutien puisqu’on va offrir un traitement – et pas juste un accompagnement – basé sur une approche choisie et adéquate (psychodynamique, cognitivo-comportementale, interactionnelle-systémique, humaniste, etc.).

Les sexologues psychothérapeutes seront aussi en mesure de faire l’évaluation des troubles sexuels comme les troubles du désir, de l’orgasme, de l’identité sexuelle, etc. Par exemple, ielles pourront effectuer l’évaluation de la dysphorie de genre et rédiger des lettres de recommandation pour l’accès, par exemple, à une chirurgie d’affirmation de genre (ex.: phalloplastie, vaginoplastie, métaoidoplastie, etc.). Les problématiques abordées peuvent prendre racine dans l’enfance, dans le passé et être creusées pour mieux comprendre le fonctionnement actuel de la personne. 

Les raisons pour consulter un.e sexologue 

Une autre question que je reçois de façon récurrente, c’est : mais de quoi les gens viennent te parler? Eh bien, 1001 choses. De fluctuations de désir, de problèmes d’érection, de questionnements sur l’orientation sexuelle ou sur l’identité de genre. On peut aussi discuter de BDSM, de relations amoureuses, de polyamour, d’image corporelle, d’anxiété de performance. Il est possible d’apprendre à mettre ses limites, à s’affirmer, à surmonter la peur de l’engagement, à gérer la jalousie, survivre à l’infidélité et/ou une rupture. Il y a aussi l’accompagnement des personnes survivantes d’agression sexuelle, les couples, sans oublier l’éducation à la sexualité, tant auprès des adultes, des ados que des plus jeunes. Bref, il y a des tas de sujets qui peuvent être abordés auprès des sexologues, selon leurs spécialités et leurs compétences. 

Ce qu’on est, finalement… 

J’ai demandé à des gens du public de me dire ce qu’ils pensent que fait un.e sexologue. 

« Un cardiologue au figuré, spécialiste de ce qui constitue émotionnellement et psychologiquement l’être humain. » Des gens qui « parlent de « chèckhe» ». Des « psychologues spécialisé.e.s » ou des « psychologues de la sexualité ». Un « miroir qui reflète la réalité d’une personne ». 

En somme, on est un peu tout ça, mais il faut aussi savoir qu’on est là pour offrir un espace d’écoute ouvert, inclusif et sans jugement. On apporte un regard neuf sur certaines problématiques et réalités vécues par celles et ceux qui nous consultent afin d’y voir plus clair et, surtout, d’amener des pistes de solution. 

Pour aller plus loin…

Site de l’OPSQ (Ordre professionnel des sexologues)

Site de l’Association des sexologues du Québec

Photo de Alex Green

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