Une sexualité est-elle possible lors d’une pandémie? Peut-on avoir une vie sexuelle satisfaisante en période de confinement et de distanciation sociale? Eh bien, oui.
Entre crise planétaire et… besoins humains
Depuis le début de la crise du coronavirus, de nombreuses personnes ont fait la blague que, d’ici quelques mois, il y aurait un incroyable baby-boom attribuable au confinement. Et qu’on appellerait probablement cette génération les «Coronariaux». Mais, selon le sociologue Richard Marcoux, c’est peu probable, car la peur n’est pas vraiment un climat propice à la conception d’un.e enfant. Bref, en pleine pandémie, les gens sont évidemment inquiets, anxieux et pensent à un tas de choses à fois. Beaucoup de personnes ont peur de perdre leur emploi actuellement et ne savent vraiment pas de quoi sera fait demain.
Mais cela dit, l’être humain est ce qu’il est. D’ailleurs, une des préoccupations importantes qui a émergé dans les médias ces derniers jours? La sexualité lors d’une pandémie. Eh oui! Malgré la situation actuelle, ce sujet demeure au cœur des angoisses sociales. Alors, comment fait-on pour avoir une vie sexuelle quand on est obligé.es de vivre en mode confinement et distanciation sociale? Voici quelques recommandations ainsi qu’une petite liste d’idées en vrac pour avoir une sexualité agréable, saine, l’fun et variée. Si, bien sûr, on a la tête à cela.
Sexualité VS pandémie
Est-ce que la COVID-19 s’attrape pendant une relation sexuelle? Peut-on encore faire des rencontres intimes? Utiliser Tinder? Est-ce que le sexe de groupe peut encore avoir lieu? Toutes ces questions tournent dans les airs depuis quelques jours et, évidemment, pandémie oblige, certaines se répondent d’elles-même. La COVID-19 n’est pas comme une ITSS: elle ne s’attrape pas directement avec, par exemple, la pénétration. Ou, encore, par l’échange de fluides, comme le sperme. Mais la contamination se fait, entre autres, par les gouttelettes de salive et le contact direct. Donc, lors d’une relation sexuelle, les risques sont très élevés de passer le virus. Conséquemment, les contacts physiques intimes sont à proscrire si les personnes qui y participent ne sont pas déjà confinées ensemble. Bref, sexualité et pandémie ne font si bon ménage. Mais, il y a d’autres façons d’avoir du plaisir.
Votre meilleur.e ami.e, c’est vous
Qui dit confinement, dit souvent solitude. Et qui dit solitude dit… plaisir solitaire! Évidemment, c’est plus difficile à gérer si on est confiné.es en famille, avec les enfants. Mais, il reste que, pour avoir une sexualité, la masturbation est le moyen le plus simple d’y arriver. Car oui, ça fait partie de la sexualité. C’est une relation intime de vous à vous. C’est un moment pour soi qui peut faire du bien et permet de se recentrer. En plus, ça détend et ça aide à mieux dormir.
Les joies de la télédildonique (et des jouets sexuels)
Plusieurs personnes ont manifestement eu cette idée, car la marque de jouets sexuels Womanizer a vu ses ventes exploser (50% d’augmentation). En Italie, les ventes sont 60% plus élevées que celles qui sont habituellement estimées. C’est que les jouets sexuels offrent une façon intéressante d’explorer sa sexualité, particulièrement lorsque l’on est chacun.e chez soi. Certains – comme ceux de la marque OhMiBod – sont conçus pour être activés à distance par une autre personne. Parmi leurs produits, on trouve des vibrateurs qui sont réactifs à la voix, aux sons et à la musique. Si vous êtes aventureux.se, certains modèles permettent même d’être contrôlés à distance par… des inconnu.es! En effet, la compagnie Lovense offre un système de chat pour être en contact avec des gens et leur laisser le contrôle de votre jouet.
Vous voulez encourager l’achat local? La compagnie québécoise Désirables propose des jouets sexuels éthiques, sans produits toxiques et faits de porcelaine. La marque montréalaise Bellesa a même offert gratuitement des milliers de jouets sexuels à ses abonné.es. Avec ces produits, c’est l’occasion de s’amuser, d’explorer, de se changer les idées. Ça permet de garder une proximité et une intimité avec l’autre, même si on est éloigné.es. Et si on est confiné.es ensemble, on peut intégrer ceux-ci à nos moments intimes et voir si ça nous branche.
Zoë Ligon, animatrice de la série Sex Stuff, essaie un jouet sexuel qui réagit à la voix:
Jouer pour jouir
Parlant jeu, sachez qu’il est également possible de revenir en mode analogue et vous procurer des jeux de table érotiques. Pensons à L’Ostie d’jeu, et son extension sexe et bouffe. Il existe une panoplie de divertissements du genre qui s’achètent en ligne. Aussi: rien ne vous empêche de créer votre propre jeu et vos propres règles. Jeu de cartes, dés, papier et crayon, table à dessin: plein d’objets s’offrent à vous pour créer votre version maison. Des exemples? Vérités/Conséquences, la bouteille ou, encore, utilisez les dés pour créer des actions à faire selon le chiffre obtenu. Il y a des tas de façons d’avoir du plaisir sans dépenser.
« Parle, parle, sexte, sexte »
Votre téléphone intelligent permet de connecter des jouets sexuels, mais n’oubliez pas qu’à la base il sert à… téléphoner. Eh oui! Je sais: beaucoup de gens ont oublié cette fonction, tellement il y a une tendance forte à détester les appels de vive voix. Mais il reste que votre petite machine vous permet cette connexion unique avec l’autre. Et ça peut devenir fort excitant si l’on y met du sien. Utilisez votre voix pour pimenter vos échanges et vous lancer dans une séance de sexe à distance, par exemple.
Ça permet d’exploiter le potentiel érotique des mots, de jouer sur les intonations et les soupirs. Faites aussi aller vos aubergines violettes et vos gouttes d’eau en textant votre partenaire. Le sextage a beaucoup de potentiel en temps de confinement. Il s’agit juste de faire attention à ce que vous envoyez via votre téléphone. Parce qu’à notre époque, on est souvent à un seul petit sexto de la revenge porn, la pornographie vindicative et les scams. Surtout en période de pandémie, alors que les gens sont plus vulnérables. Donc, soyez vigilant.es. Particulièrement avec les photos et vidéos.
Porno: une hausse importante
La consommation mondiale de films pornographiques est généralement assez élevée. Il n’est donc pas fou d’imaginer qu’elle le sera plus encore à la fin de cette période trouble. On a déjà noté une hausse de 30% en Chine. L’Italie ne sera probablement pas en reste. En effet, la compagnie PornHub a proposé ses services gratuitement à la population italienne pendant la période de confinement. Une nouvelle tendance a même émergée: la «coronavirus porn». Plusieurs médias ont aussi colligé des listes de sites à consulter si l’on souhaite visionner des contenus pornographiques.
La pornographie mainstream – souvent disponible gratuitement – propose généralement du contenu assez stéréotypé. Elle reconduit fréquemment les clichés les plus problématiques et peut encourager des conditions de travail médiocres pour les acteurs.trices. En contrepartie, certains sites – payants – offrent des films plus artisanaux, réalisés dans des conditions respectueuses. Le contenu y est souvent plus diversifié et inclusif. Je pense à Pornceptual ou encore le site Xconfessions, avec les films d’Erika Lust.
Le plaisir des mots
C’est le temps ou jamais d’aider vos librairies préférées. D’ailleurs, la campagne Aide tes libraires est actuellement en cours pour supporter les librairies indépendantes. C’est l’occasion idéale d’explorer la littérature érotique. BD, romans, poésie, beaux-livres; il y a des tas d’ouvrages qui abordent la sexualité et l’érotisme avec brio. On peut les garder pour soi, mais aussi partager à son.sa.ses partenaire(s), question de se mettre dans l’ambiance. Via téléphone aussi ou, même, par courriel, en citant des bouts particulièrement inspirants, par exemple. En d’autres occasions, je vous suggérerais aussi d’envoyer une lettre écrite. Mais puisque le virus peut demeurer sur les objets pendant plusieurs heures, c’est un peu risqué actuellement.
Ajoutons à cette liste les aux livres audio. Par exemple, le site Littératureaudio.com possède près de 9000 livres audio disponibles gratuitement, dont une section «érotisme». C’est une belle façon de s’inspirer et, en plus, de laisser ses mains libres pour s’amuser. Sans oublier les balados dont la popularité est, depuis plusieurs années déjà, exponentielle. Gageons qu’ils le seront encore plus dans les circonstances actuelles. Dans ce registre, je vous suggère Ferry, traversée érotique, disponible sur l’application OHdio et Les chemins de désir sur Arte Radio.
À lire: Sexualité: des livres à (re)découvrir en quarantaine
Se faire du bien, malgré tout…
Je sais que la situation actuelle n’est vraiment pas évidente et qu’on est un peu en mode «advienne que pourra». Je sais aussi que vous avez probablement la tête à 10 000 autres endroits que dans vos culottes. Mais tout comme le sport et l’activité physique ont des bénéfices sur la santé mentale, la sexualité n’est pas en reste. Elle demande peut-être juste un peu plus de créativité actuellement. Alors, en temps de pandémie, elle est non seulement possible, mais peut être excitante voire même redonner du oumph à nos journées. Elle peut nous offrir du temps pour soi, question de se changer les idées en attendant la suite des choses…
Image de une: Mika Baumeister via Unsplash