Comment parler de sexualité avec les ados?

Une chronique pour Moteur de recherche dans laquelle on se penche sur la sexualité des ados. Écouter la chronique audio.

C’est une question qui revient TRÈS fréquemment, parce que beaucoup de parents ne savent pas comment aborder ce sujet. C’est un peu normal: c’est délicat et très intime. Mais il y a des façons de bien faire les choses et s’assurer de passer un message positif, respectueux et ouvert par rapport à la sexualité. 

Ce qui freine la conversation, ce sont souvent les peurs. Par exemple, la peur d’ouvrir la discussion et d’initier quelque chose. De devenir le déclencheur de la sexualité du jeune ou de la jeune. Ou, encore, la crainte d’avoir à raconter ses propres expériences sexuelles. Il y a aussi l’inquiétude de mettre son enfant mal à l’aise et de ressentir soi-même le malaise. Sans oublier le stress de ne pas avoir les bons mots, de ne pas expliquer comme il faut. Bref, il y a beaucoup d’angoisse autour de tout ça. Je vais tenter de vous aider à, d’abord vous calmer #lol et, ensuite, faire en sorte que vous vous sentiez plus solides pour affronter cette étape. Parce qu’elle est vraiment importante. 

Déconstruire les mythes

Mythe #1: Parler de sexualité va encourager les jeunes à expérimenter plus tôt

FAUX! 

Au contraire, une discussion saine et ouverte fait souvent en sorte que la personne expérimente plus tardivement, au moment où elle se sent prête à aller de l’avant. Plus elle a de l’information sur le sujet, plus elle est en mesure de savoir 1) ce qu’est la sexualité dans son ensemble et réaliser qu’on parle avant tout de santé sexuelle, 2) ce qui peut constituer une situation d’abus ou, encore, 3) les risques encourus (grossesses non-désirées, ITSS, agressions sexuelles, etc.). 

Mythe #2 : Vous devrez dévoiler votre propre sexualité pour expliquer comment ça fonctionne

FAUX! 

Votre ado à des limites qu’il ou elle ne veut pas franchir en discutant sexualité avec vous. Parce que vous demeurez une figure parentale et ça peut être gênant. Mais vous aussi, vous avez des limites! Vous avez totalement le droit de mettre une frontière à ne pas franchir à propos de certains éléments, parce que ça vous met mal à l’aise. Et vous n’êtes, en aucun cas, obligé.es de dévoiler l’entièreté de votre vie sexuelle. Surtout que la vie sexuelle d’une personne peut être à des années-lumière du voisin ou de la voisine d’à côté.

Ce sera pareil pour vos enfants: ielles auront leurs préférences, leur façon de voir la chose, leurs limites à établir, etc. Ce qui est important avant tout, au-delà de la sexualité propre à chacun.e, c’est d’aborder plus largement la sexualité dans son ensemble, Et pas nécessairement d’aller donner des détails croustillants issus de vos propres expériences. Cela dit, si vous êtes à l’aise de le faire et si votre ado est intéressé.e à l’entendre: tant mieux! Ça peut initier de superbes discussions. Mais l’idée est surtout d’offrir un espace pour dialoguer ou, simplement, écouter sans jugement. 

Mythe #3: Les ados sont hypersexualisé.es, sont super précoces et veulent tout essayer! 

FAUX!

L’âge de la première relation sexuelle – on parle ici d’une relation sexuelle hétéronormative, donc une personne de sexe féminin et une autre de sexe masculin, avec pénétration vaginale – n’a pas changé dans les vingt dernières années. J’en ai parlé dans une chronique l’an dernier: les ados en général ne sont pas plus «dévergondé.es» que l’étaient leurs parents. Les pratiques sexuelles non conventionnelles (BDSM, sexe anal, chemsex, etc.) ne  constituent pas la base de leur sexualité non plus. En fait, les jeunes sont généralement plus au courant de notions comme le consentement et vont être aussi plus intéressé.es à des questions de diversité sexuelle, corporelle, identitaire. La sexualité est beaucoup plus appréhendée comme un large spectre des possibles et c’est assez sain, à mon humble avis. 

Quelques trucs et astuces pour discuter sexualité sans complexes

#1 Nommer les malaises

Oui, il y aura probablement des petits malaises au cours des discussions sur la sexualité. On peut les nommer. Je donne un exemple: « Écoute, je vais être honnête: je suis un peu gêné.e, je sens que tu l’es aussi, mais j’ai le goût de passer par-dessus ça, parce que j’ai vraiment envie qu’on en jase ensemble. Qu’est-ce que t’en penses? »

Être honnête sur ce qu’on ressent peut aider à montrer une certaine vulnérabilité et indiquer aux jeunes que c’est loin d’être une science infuse et que c’est un domaine qui fluctue, qui évolue. Important également: être capable d’avouer qu’on ne connait pas quelque chose. Les jeunes ont souvent peur d’avoir «l’air bébé» et de ne pas faire partie de la «gang» qui a déjà expérimenté et qui connaît ça. Leur montrer que, même adulte, on peut avoir des doutes, des questionnements, des incertitudes, ça démontre qu’il n’y a pas d’âge pour apprendre. 

#2 Ne pas forcer les choses 

Ça se peut que, d’un côté comme de l’autre – du parent comme de l’ado –  le sujet soit vraiment source de malaise, d’un trop grand stress, voire de conflits. Ça ne sert à rien de forcer les choses. Mais déjà, de juste se montrer disponible et ouvert.e à la discussion, c’est génial. Expliquer que, si jamais il ou elle veut en parler, veut poser des questions, veut comprendre certains termes qui ont rapport à la sexualité, vous raconter quelque chose qu’il ou elle a vécu, vous êtes là pour accueillir l’information et pour l’écouter. Essayer aussi de faire comprendre qu’il n’y a pas de bon chemin à prendre ni de bonne façon de vivre sa sexualité, mis à part qu’elle soit – tout comme le consentement d’ailleurs – libre, enthousiaste et éclairée. 

#3 Aborder le consentement! 

On en entend énormément parler, avec raison: le consentement est une notion primordiale qui devrait être abordée rapidement et, même, à un jeune âge. Par exemple, on peut expliquer à l’enfant plus jeune qu’il ou elle n’est pas obligé.e, au party de Noël, de recevoir les becs de mononcle Roger ou matante Céline, même s’ils sont très insistants, s’il.elle n’en a pas envie. C’est une façon d’expliquer les limites et la notion d’espace personnel. Savoir que son intégrité physique doit être respectée, c’est important pour pouvoir mettre des frontières ensuite par rapport à comment on souhaite être approché, touché, et ça aura nécessairement un impact sur la sexualité. 

À LIRE: Comment parler de consentement sexuel?

#4 La sexualité est une expérience globale, pas juste une pénétration

Il faut qu’on arrête de baser notre discours sur la sexualité en ayant comme seule référence la pénétration. Premièrement, parce que ça hiérarchise les types de relations sexuelles. En effet, on met la fameuse pénétration comme seul barème acceptable pour déterminer qu’un acte sexuel est «complet». Alors qu’il y a 1001 façons de vivre la sexualité.

Ça relègue aussi en arrière-plan des pratiques comme le  sexe oral, la masturbation mutuelle, même les caresses et les baisers qui sont des éléments importants de l’intimité et de l’excitation sexuelle. Ça implique aussi automatiquement une sexualité hétérosexuelle, parce qu’on prend comme modèle la pénétration vaginale, donc d’un pénis dans un vagin et on base la «finalité» de l’acte sur l’éjaculation, ce qui a pour conséquence de mettre de côté non seulement plusieurs orientations sexuelles possibles, mais également plusieurs personnes dont les organes génitaux ne sont pas «conformes» à cette description. Pensons aux personnes intersexuées ou aux personnes trans, par exemple. 

#5 Il ne faut oublier qu’il s’agit aussi de santé sexuelle 

Souvent, quand on parle sexualité, on a en tête l’acte sexuel. Mais la sexualité, ça englobe aussi la santé sexuelle. C’est-à-dire qu’on peut parler d’un tas de sujets comme l’hygiène, les menstruations, l’ovulation, la santé globale des organes sexuels, la contraception, l’avortement, la masturbation, l’anxiété, la santé mentale, etc. 

#6 Ce n’est pas UNE seule discussion, mais un dialogue ouvert et constant 

On parle souvent de LA fameuse discussion sur la sexualité à avoir avec ses ados. Et, pourtant, c’est un concept qui met une pression énorme sur les épaules des parents. Et, j’ajouterais, vous êtes bons et bonnes si vous arrivez à tout couvrir dans une seule et même discussion! Parler sexualité, ça devrait être un processus qui s’étend sur du long terme et qui commence tôt. Par exemple, assez jeune pour faire comprendre les différentes parties du corps et apprendre à les nommer comme il faut. Et ce processus peut se poursuivre par la suite, selon les étapes de vie par lesquelles passe votre ado. Les questions sur la sexualité ne seront pas les mêmes à 6 ans qu’à 12 ans! Donc, ils et elles ont besoin de vous pour traverser tous ces différents moments de vie.

À LIRE: Comment aborder le sujet de l’orientation sexuelle avec votre enfant?

Quelques outils et références pédagogiques pour aborder sainement le sujet de la sexualité

Il existe de nombreuses ressources sur lesquelles s’appuyer pour lancer le fameux sujet de la sexualité. Je vous en offre quelques-unes qui, à mon sens, offrent des informations pertinentes, inclusives et saines.

Photo de une: Sharon McCutcheon via Unsplash

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